Notes
[1]
Jusqu’à la fin du XVIIIe siècle, la Chine était encore la première puissance économique mondiale. Voir A. Maddison, L’Économie mondiale. Une perspective millénaire, OCDE, 2001.
[2]
Cette conception se retrouve sous des formes plus ou moins subtiles dans un grand nombre de discours et d’analyses contemporaines. Voir A. Laïdi, Les États en guerre économique, Paris, éditions du Seuil, 2010.
[3]
Les réactions hostiles face à l’OPA de Mittal Steel sur le groupe Arcelor en 2006 illustrent les ambiguïtés du concept de nationalité, appliqué à des acteurs par nature transnationaux. Mittal Steel était en effet une société européenne, au sens juridique du terme, avec un siège social à Rotterdam, même si son actionnaire principal était d’origine indienne.
[4]
Voir G. Carron de la Carrière, La Diplomatie économique. Le diplomate et le marché, Paris, Economica, 1998.
[5]
On assiste ainsi à une « multilatéralisation » et à une « juridicisation » de questions traitées auparavant par des diplomates dans un cadre bilatéral. C’est le cas pour les questions commerciales avec l’organe de règlement des différends (ORD) de l’OMC. Ce serait aussi le cas pour les négociations environnementales, si une organisation mondiale de l’environnement voyait le jour.
[6]
La reconnaissance d’un statut pour les ONG à l’ONU, et dans la plupart des agences multilatérales, dans les années 2000, est révélatrice de cette évolution.
[7]
Cependant, même dans ces pays à tradition politique centralisée, l’activité économique tend à échapper partiellement ou totalement au pouvoir central. Certaines provinces chinoises disposent ainsi de leurs propres bureaux de représentation économique à l’étranger, et il n’est pas rare de rencontrer des grandes entreprises issues des pays émergents qui possèdent une « signature de crédit » supérieure à celle de leur État d’origine.
[8]
Ces trois pays ont créé en juin 2003 le groupe IBSA (ou BASI en anglais), afin de coordonner leurs positions au sein de l’OMC.
[9]
Ces deux ministères des Relations extérieures possèdent leur propre école de formation diplomatique : Instituto Rio Branco au Brésil, MGIMO en Russie.
[10]
L’acceptation par la Chine et la Russie des sanctions économiques promues par les États-Unis contre l’Iran montre que ces pays sont prêts à sacrifier des intérêts à court terme pour préserver leur relation stratégique avec la puissance hégémonique. L’opposition du Brésil et de la Turquie à ces sanctions relève, à l’inverse, d’une posture destinée à affirmer leur statut de puissances autonomes, et leur volonté de promouvoir une vision multipolaire des relations internationales.
[11]
On en a eu une illustration en 2005 lorsque le Congrès américain a opposé son veto à la tentative de rachat de la société UNOCAL par le groupe pétrolier CNOOC, contrôlé par le gouvernement chinois.
[12]
Ces antagonismes soulignent aussi en creux les « ratés » de l’intégration économique et financière internationale et renvoient, au-delà du G20, aux réformes des institutions de Bretton Woods, seules à même de permettre le traitement de ces questions dans un cadre multilatéral « dépassionné ».
[13]
Le G77 rassemblait à la fois des pays exportateurs et des pays importateurs nets de pétrole. Mais en réclamant un prix mondial élevé pour les matières premières, les pays exportateurs de pétrole ont mis à mal la solidarité de façade de cet ensemble hétérogène.
[14]
Le blocage de la conférence de l’OMC à Cancún en septembre 2003, orchestré par le G20-Sud, avait des airs de revanche sur le sommet Nord-Sud de Cancún en octobre 1981, « torpillé » par les pays du Nord.
[15]
Voir P. Marchesin, La Revanche du Sud, Paris, L’infini, 2010.
[16]
Voir J. Ramo Cooper, The Beijing Consensus, The Foreign Policy Centre, 2004.
[17]
Voir G. Perrier, « Les nouveaux horizons de la diplomatie turque », Le Monde, 21 avril 2010.
[18]
Selon Davutoglu, la « profondeur stratégique » de la Turquie s’appuie sur sa situation géographique et historique, en tant qu’héritière directe de l’Empire ottoman. Voir A. Murinson, “The Strategic Depth Doctrine of Turkish Foreign Policy”, Middle Eastern Studies, vol. 42, n° 6, 2006.
[19]
En contournant les pays de transit (Biélorussie, Ukraine) situés dans l’« étranger proche » de la Russie, avec lesquels cette dernière entretient des relations en demi-teinte.
[20]
Telle que l’envisageait par exemple l’empereur allemand Guillaume II avec son projet de « Bagdadbahn » (ligne ferrée de Berlin à Bagdad) qui avait pour finalité, sous couvert de développement économique, de mettre fin à l’hégémonie franco-britannique au Moyen-Orient.
[21]
Ce n’est évidemment pas le cas des acteurs étatiques, comme les grandes entreprises publiques, ou contrôlées par l’État, dont le poids constitue une caractéristique essentielle de l’économie des grands pays émergents comme la Chine, l’Inde, la Russie et le Brésil. Ce « capitalisme d’État » est évidemment plus facile à orienter dans le sens des intérêts géopolitiques de ces pays. Voir à ce sujet mon livre sur les BRIC, à paraître aux éditions Ellipses au printemps 2011.
[22]
De surcroît lorsque ces pays sont liés par des alliances militaires avec les États-Unis, comme c’est le cas de la Corée du Sud depuis 1953 ou dans une moindre mesure de l’Arabie Saoudite depuis 1951 (il ne s’agit pas dans ce cas d’une « alliance » militaire stricto sensu).
[23]
Les plus anciens de ces fonds, comme la Kuwait Investment Authority, remontent aux années 1950. La plupart d’entre eux ont été créés dans les années 1970, comme le fonds TEMASEK de Singapour créé en 1974, ou le fonds ADIA de l’émirat d’Abu Dhabi créé en 1976. Mais leur essor date des années 2000.
[24]
Voir A. Rugman, C. Hoon Oh, “Korea’s Multinationals in a Regional World”, Journal of World Business, n° 43, 2008.
[25]
En 2007, le groupe coréen Samsung a dépensé plus en R&D que le géant américain IBM, selon un rapport de l’OCDE. Voir OCDE, Tendances récentes de l’internationalisation de la R&D du secteur des entreprises, 2008.
Résumé
Français
Le sommet du G20 à Pittsburgh, en septembre 2009, a consacré l’émergence de nouvelles puissances économiques (BRIC, Mexique, Corée du Sud, Indonésie, Turquie, Arabie Saoudite, Afrique du Sud, Argentine) qui aspirent à jouer un rôle accru dans la gouvernance mondiale, au côté des puissances traditionnelles du G7. Mais en quoi consiste la diplomatie économique de ces nouvelles puissances, à l’ère du soft power et de la mondialisation ? Les exemples tirés des expériences nationales montrent que la mondialisation a profondément transformé les pratiques diplomatiques, dans le sens d’un plus grand pragmatisme, d’une adaptation des modi operandi aux réalités d’un monde interdépendant et multipolaire, et d’une meilleure intégration des enjeux économiques et géostratégiques. Dans ce contexte, l’efficacité de la diplomatie économique dépend surtout de la capacité de ses promoteurs à réaliser des synergies entre acteurs publics et privés, et à utiliser intelligemment certains « effets de levier », pour accroître leur influence dans les enceintes internationales comme le G20.